Chapitre IV

Chapitre IV

Le lendemain soir, au cours du dîner qui réunissait pour la première fois de la journée le duc et la duchesse de Mayonne, ainsi que leurs enfants, on parla naturellement de la soirée de la veille, que tous, sauf Henry, déclaraient parfaitement réussie. Françoise avait eu beaucoup de succès dans son rôle. Elle se rendait compte elle-même qu’elle s’était surpassée, comme elle le déclara, sans ombre de modestie.

Pierre, par taquinerie, fit observer :

Mme de Tournis a été extraordinaire ! Quel jeu ! Quel entrain !… Et elle paraissait presque jolie, tellement elle était maquillée avec art.

Françoise eut une moue dédaigneuse.

Tu n’es pas difficile ! Elle joue bien, c’est incontestable, mais elle est laide non moins incontestablement !

Mais non, mais non… Et quel esprit !

De l’esprit à clinquant, de l’esprit saltimbanque. Cela amuse un instant, je ne dis pas ; mais on en découvre vite la pauvreté.

Cette aimable rousse n’a pas l’heur de vous plaire, ma chère sœur. Petites jalousies d’actrices, hein ?

M. de Mayonne dit, en se servant de la volaille que lui présentait le maître d’hôtel :

M. Faravès, que j’ai rencontré cet après-midi, paraissait enchanté de sa soirée.

Pierre gouailla :

Ces marchands de bœufs enrichis n’ont pas de plus grande joie que de se trouver entre les murs d’un hôtel aristocratique et de voir leur nom plébéien mêlé, dans les comptes rendus mondains, aux grands noms de France.

Un tressaillement de contrariété passa sur la physionomie longue et flétrie de M. de Mayonne.

Don Emilio n’est pas marchand de bœufs. Il a fait sa fortune dans les conserves, d’après un système inventé par lui, et qui supprime toute crainte d’intoxication.

Oh ! vous savez, je n’y vois pas grande différence ! Qu’il ait élevé la bête ou qu’il l’ait seulement mise en conserve, cela se vaut à peu près. Le tout à considérer est que cette industrie-là lui a rapporté de quoi se poser aujourd’hui en gros personnage… Au reste, il n’est pas mal, cet homme. Un peu trop enclin seulement à parler de ce qu’il a acheté, de ce qu’il achètera.

Mme de Mayonne fit observer :

Doña Luisa est fort gentille.

Son mari approuva :

Extrêmement bien, et vraiment intelligente… N’est-ce pas, Henry ?

Mais oui, mon père, elle cause avec agrément.

Pierre eut un sourire entendu, en se penchant un peu pour regarder son aîné, placé à la droite de Mme de Mayonne.

Elle est bien pincée la pauvre petite ! Coup de foudre ! Ça se voyait clair comme le jour, à la fin de la soirée. Ses millions et son cœur sont aux pieds de son beau vainqueur.

Henry eut un léger mouvement d’épaules et adressa à Mme de Mayonne une question qui changea le sujet de l’entretien.

En sortant de table, les trois hommes se dirigèrent vers le fumoir. Mais Pierre s’arrêta à la porte.

Je vous laisse. Orlani doit venir me chercher tout à l’heure.

M. de Mayonne dit brusquement :

C’est lui qui t’entraîne à jouer ?

Oh ! je n’ai besoin de personne pour cela ! Je m’entraîne tout seul. En ce moment, c’est la chance en plein ; j’en profite. Dix mille francs hier. Je nage dans l’or !

Et il s’esquiva, sans attendre d’autres observations dont il se souciait peu d’ailleurs, ayant pleine conscience que le père dont il suivait l’exemple se trouvait de ce fait désarmé devant lui.

M. de Mayonne s’approcha de la table sur laquelle se trouvaient ses cigares, en murmurant avec irritation :

Ce garçon est incorrigible !

Henry avait allumé une cigarette. Il s’assit en face de son père, qui venait de choisir minutieusement un cigare.

Sors-tu, ce soir, Henry ?

Non, mon père, je travaille.

À ton “Maréchal de Mayonne” ?… Il avance ?

Mais oui, lentement. J’ai beaucoup d’ouvrages à compulser.

Tes “Visions d’Orient” vont paraître cette semaine ? Ce sera un énorme succès.

Oh ! je n’ai pas cette prétention ! Sans Guy, je n’aurais même pas songé à lancer dans le grand public ces impressions de voyage, notées pour mes amis, et pour mon propre plaisir.

Tu aurais eu tort. Ce que tu m’en as donné à lire m’a complètement charmé, en me révélant chez toi un très rare talent littéraire. Voilà un fleuron de plus à ta couronne de perfections, Henry.

Son regard souriant s’attachait avec une orgueilleuse satisfaction sur ce fils qui flattait si puissamment son amour-propre, et qui faisait légèrement vibrer chez lui, depuis quelque temps, la fibre paternelle presque desséchée.

Il se tut un moment, en tirant quelques bouffées de son cigare. Henry, rêveur, suivait d’un œil distrait les spirales de fumée légère qui s’échappaient de sa cigarette… M. de Mayonne toussa un peu et dit :

Ce serait le moment de te marier. Tu as vingt-neuf ans, tu es très recherché, comme tu le sais. Il faudrait te décider.

Rien ne presse, mon père.

Oh ! évidemment !… Mais il y a des occasions… Ainsi, en ce moment, si tu voulais…

Il toussa encore, jeta un coup d’œil sur le front haut dont la forme annonçait une volonté réfléchie, sur la bouche aisément dédaigneuse, sur tout ce visage viril où s’inscrivait la hautaine assurance de l’homme qui va à son but dans la vie, résolument, en se sachant dans la vérité.

… Il y a une femme charmante, et très riche, qui serait toute prête à t’accorder sa main. Elle n’est venue hier que pour toi, parce qu’elle t’avait aperçu l’autre jour à la conférence de Sorlèges, et que tu lui avais plu… énormément… Elle a fait demander par Mme de Manseuil une invitation pour notre soirée… Et cette après-midi, son oncle ne m’a parlé que de toi, dans les termes les plus flatteurs.

Henry demanda froidement :

De qui est-il question ?

Voyons, tu l’as bien deviné !… De Mlle Faravès, naturellement. Hier soir, elle t’a fait la cour de façon assez visible, ce qui est quelque peu le monde renversé !

Il se mit à rire. Mais Henry restait froid et sérieux et le pli de dédain s’accentuait au coin de ses lèvres. Il dit avec une tranquille ironie :

Ces gens-là ne doutent de rien. Vous ferez bien, mon père, de tenir à l’écart ces Faravès, afin qu’ils comprennent au plus tôt l’inanité de leurs prétentions.

Les tenir à l’écart ! Es-tu fou ?… Mais ce serait un mariage magnifique !… Vingt-cinq millions !… Et l’héritage de l’oncle, pour moitié ! Songe que notre fortune, très considérable autrefois, est bien réduite aujourd’hui. Il nous faut de gros revenus, pour tenir notre rang. Mayonne nous coûte chaque année, au lieu de nous rapporter. Une union telle que celle-là ferait de toi l’un des hommes les plus riches de France.

Henry se leva brusquement.

Eh quoi ! mon père, avez-vous pu songer sérieusement à un mariage de ce genre ? Pensiez-vous donc que j’allais me vendre ainsi ?… En vérité, il faut que vous me connaissiez bien peu !

Le père, un instant, baissa les yeux sous l’ardent regard d’indignation. Et il balbutia :

Mais, mon cher ami, tu vois très mal les choses. La jeune fille est jolie, intelligente, et elle t’adorerait. Toi, tu pourrais l’aimer…

Je vous en prie, mon père, pas un mot de plus ! Serais-je réduit à la mendicité, jamais je n’épouserais cette étrangère dont tout me sépare : les sentiments, l’éducation — sans parler du souci que nous devons avoir de conserver l’intégrité de notre vieille race.

M. de Mayonne se leva à son tour. Il dit avec irritation :

Tout cela est fort beau. Mais notre vieille race a besoin d’argent, et il faut le prendre où il est.

On peut le trouver ailleurs que dans les fabriques de conserves Faravès et Cie.

Tu n’en trouveras jamais autant. Songe donc, c’est une puissance ! Avec tes goûts raffinés, quels rêves ne pourrais-tu pas réaliser ? toutes les satisfactions te seraient données… toutes, toutes ! Ah ! d’autres, à ta place, seraient dans l’enivrement !

Il s’animait en parlant, et un peu de rougeur montait à son teint flétri.

Henry, impassible en apparence, le regardait… Mais combien au fond il souffrait d’être, moralement, si loin de son père !

Il dit avec calme :

Je m’accommoderai sans peine d’une vie simple, s’il est nécessaire. Mais je tiens, avant toute chose, à choisir une compagne qui se trouve avec moi en conformité de croyances, d’éducation, d’idées morales. Or, j’ai pu constater dès hier soir qu’il n’en était pas ainsi pour Mlle Faravès.

Tu la transformerais à ton gré, puisqu’elle t’aime.

C’est une expérience que je ne me soucierais pas de faire… Mais laissons ce sujet, je vous prie, mon père. Je n’épouserai jamais cette étrangère, pour les raisons que je vous ai dites, d’abord, et ensuite parce qu’elle ne me plaît aucunement.

D’un geste nerveux, M. de Mayonne jeta dans le cendrier son cigare éteint.

Tu es difficile ! Bien peu de jeunes filles, dans nos relations, sont aussi jolies qu’elle. Évidemment elle s’habille un peu trop en étrangère ; mais ce sont de petits détails bien faciles à changer.

Henry dit brièvement :

C’est tout qui me déplaît chez elle.

M. de Mayonne, croisant les mains derrière son dos, fit quelques pas à travers la pièce. Un pli de contrariété apparaissait sur son front… Il s’arrêta devant son fils, en lui jetant un regard irrité.

Tu veux faire un mariage d’amour ?

Un mariage de sympathie, tout au moins.

Et si tu aimes une femme sans fortune ?

Ce que je possède suffirait pour me permettre de l’épouser.

M. de Mayonne eut un rire railleur.

Ah ! par exemple ! Je voudrais bien te voir soutenir notre train de vie avec cela !

Mais qui vous dit, mon père, que je mènerais ce train de vie ?

Un duc de Gesvres ne peut faire autrement, sans déchoir. Tous nos ancêtres ont eu l’existence fastueuse des vrais grands seigneurs… Et après moi, avec quoi soutiendras-tu les charges qui pèsent toujours sur une famille comme la nôtre ? Avec quoi entretiendras-tu Mayonne, qui nous absorbe chaque année un gros revenu ?

Mayonne ? Mais au lieu de nous coûter, il pourrait nous rapporter, superbement ! Il y a là des terres riches, des prés qui sont les plus beaux de la contrée. Tout cela est affermé pour le quart de sa valeur. Exploité directement par nous, sans l’intermédiaire d’un intendant qui fait là trop grassement son profit, et en imposant à nos fermiers les méthodes nouvelles, le domaine nous donnerait un produit magnifique ; tous les frais pour l’entretien du château, du parc, des terrains de chasse seraient couverts et bien au-delà.

M. de Mayonne écoutait son fils avec une sincère stupéfaction. Il l’interrompit en s’exclamant :

Qu’est-ce que tu dis ?… Exploiter nous-mêmes Mayonne ? Aller vivre là-bas toute l’année, sans doute ?

Toute l’année, non, mais une grande partie. Ce serait la véritable solution pour arrêter cet effritement de notre fortune dont vous vous plaignez — une solution très honorable, qui aurait en outre l’avantage de nous mettre en contact avec nos paysans et de nous permettre de leur faire quelque bien matériel et moral.

Un petit rire sec s’échappa des lèvres de M. de Mayonne.

Vraiment, tu parlais sérieusement ?… Je ne l’aurais pas cru, car l’idée est plaisante ! Mon cher, un homme comme toi n’est pas bâti pour jouer les gentlemen-farmers. Il a mieux à faire dans le monde, où tous les succès t’attendent. Mayonne restera ce qu’il est, et toi, tu te marieras richement. Puisque doña Luisa ne te plaît pas, n’en parlons plus. Mais dans notre monde, tu trouveras des héritières — infiniment moins dorées, hélas ! — qui ne demandent qu’à voir ton choix s’arrêter sur elles.

Je n’épouserai pas “une héritière”, mon père ; j’épouserai la femme que je croirai pouvoir aimer et estimer complètement. Si elle est riche, tant mieux ; si elle ne l’est pas, tant mieux encore, car j’aurai alors le bonheur de lui faire une vie plus facile.

M. de Mayonne leva les épaules avec colère.

Voilà de belles sottises !… Ah ! ton frère est autrement pratique que toi ! Il ne voit pas la vie à travers le voile de l’idéal, lui, et sait en jouir largement.

Henry dit d’une voix frémissante, un peu dure :

Me reprocheriez-vous, mon père, de ne pas imiter Pierre ?

Une rougeur vive monta au teint blafard de M. de Mayonne. Et les yeux du père, pleins de trouble, se baissèrent sous le fier regard indigné.

Tu te méprends, mon enfant… Je ne voulais pas du tout dire cela. Mais je crains que tu n’aies des idées un peu chimériques… Des idées très belles, très chevaleresques, j’en conviens… Mais par le temps qui court, elles sont un peu dangereuses.

Henry s’approcha du cendrier, y jeta la cigarette qu’il avait machinalement conservée à la main. Puis il revint à son père, qui le suivait d’un regard encore gêné.

Ces idées-là font partie de mon être moral, et je ne pourrais les renier sans déchéance. Jamais je ne me mésallierai pour de l’argent, jamais je n’épouserai une femme, fût-elle de mon monde, si je ne puis lui donner toute mon estime ou si je sais ne pouvoir l’aimer… Et maintenant, mon père, permettez-moi de me retirer, car je souhaiterais travailler longuement, ce soir.

M. de Mayonne lui tendit la main, avec un bonsoir contraint. Devant cette énergique volonté, cette intransigeance qui rejetait toutes les compromissions de conscience, le père avait toujours eu l’impression d’être vaincu, humilié, et il en ressentait une colère secrète à laquelle se mêlait pourtant une sorte d’admiration pour cette force morale qui l’écrasait. Quand la porte se fut refermée sur Henry, il dit entre ses dents :

Tête de fer ! Il fera ce qu’il voudra, et rien de plus !… Cependant cette petite Faravès aurait si bien réalisé mon rêve pour lui !… Et l’oncle avait l’air presque autant emballé qu’elle !… Où a-t-il donc été chercher toute sa haute vertu, ce garçon-là ?

* * *

Cet entretien avait réveillé chez Henry une de ses plus vives souffrances : l’impossibilité où il se trouvait de respecter comme il l’aurait voulu ce père qui ne pouvait donner à ses fils que l’exemple d’une complète faillite à tous ses devoirs. Il lui montrait aussi, une fois de plus, jusqu’à quel point il était incompris de tous les siens — car, d’après les appréciations indulgentes faites par sa mère et Françoise au sujet de mariages tels que celui qu’on lui offrait, il ne doutait pas d’être blâmé également par elles.

Dans cette demeure, il avait toujours eu l’impression d’une solitude morale complète. Combien de fois en avait-il souffert, secrètement, au cours de son enfance et de son adolescence ! Et maintenant qu’il était homme, il continuait de cacher sous une apparence de réserve hautaine son avide désir d’affection, de vie familiale, de complète union d’âmes à l’ombre du foyer. Il savait trop, hélas ! qu’il ne pouvait attendre ce simple bonheur du ménage désuni de son père et de sa mère, ni de l’égoïsme de Françoise et de Pierre, si différents de lui-même. Et il songeait :

« Il faudrait que je me marie. Mais qui choisir ? »

Cette pensée lui occupait l’esprit, tandis qu’il gagnait le lendemain matin Saint-Germain-des-Prés pour y entendre une messe matinale. En son imagination, il faisait défiler les jeunes personnes susceptibles de devenir duchesse de Gesvres… Certaines d’entre elles lui plaisaient relativement et semblaient avoir des qualités sérieuses… Il ne pouvait demander la perfection morale et physique et, raisonnablement, saurait se contenter du principal, sans chercher à réaliser un idéal probablement inexistant sur la terre.

À ce moment de ces réflexions, il revit en esprit le délicieux visage de Yolaine de Rambuges, et ses yeux où il avait cru saisir le reflet d’une âme très belle. Il pensa avec un petit frisson d’émoi :

« Oui, elle, c’est mon rêve, physiquement. Mais sais-je ce qu’elle est, au fond !… D’ailleurs, je ne la reverrai peut-être jamais. »

Il entra dans l’église, éclairée discrètement. Une odeur de cire chaude, de vieilles pierres, flottait dans l’atmosphère tiède… Henry se dirigea vers une chapelle où la messe commençait. L’assistance était nombreuse. Le jeune homme prit une place libre, au hasard… Pendant un long moment, il resta recueilli. Lorsque son regard se releva, il vit presque devant lui, un peu à gauche, Mlle de Rambuges.

Pendant un moment, Henry se demanda s’il rêvait Puis il pensa :

« C’est vrai, elle est aussi sur cette paroisse ! Mais alors elle va donc à l’église, ici ? »

L’émotion accélérait les battements de son cœur. Discrètement, mais avec une attention profonde, il examinait la jeune fille. Elle appuyait sur ses mains jointes son visage, qu’Henry voyait seulement de profil et qui lui parut encore amaigri. Les yeux fixés sur l’autel, elle semblait prier avec une ferveur tranquille et douloureuse. Puis elle mit son front entre ses mains et resta longtemps ainsi, presque immobile.

Henry essaya de détourner d’elle son regard et sa pensée. Mais une émotion vive le dominait, à revoir là celle dont le souvenir ne l’avait pas quitté. Il songeait :

« Serait-ce la réponse de Dieu ? Serait-ce une indication pour mon avenir ? »

Comme la messe finissait, il vit Yolaine approcher un mouchoir de son visage et essuyer doucement ses yeux. Puis elle abaissa la voilette qui entourait une très simple petite toque, se leva et s’éloigna après une génuflexion.

Henry, très ému, pensa :

« Elle a pleuré ! Pauvre petite ! Cette femme la rendrait-elle malheureuse ? »

Une pitié tendre le pénétrait. Il aurait voulu la suivre, essayer de connaître la cause de son chagrin. Mais il était trop maître de lui pour céder à ce désir de son cœur déjà épris. Il quitta la chapelle quelques minutes plus tard et redescendit la nef lentement… Comme il arrivait au bénitier, il vit tendant la main vers l’eau sainte, Yolaine de Rambuges, qui s’était sans doute arrêtée au passage à l’une des petites chapelles pour prier un saint particulièrement honoré d’elle.

La jeune fille le reconnut aussitôt, car elle rougit, en répondant à son salut discret. Ses yeux tristes s’éclairèrent en rencontrant ceux d’Henry. Le jeune homme ouvrit devant elle le battant de la porte et s’effaça pour la laisser passer. Il sortit à son tour, et regarda s’éloigner la silhouette élégante, qui disparut bientôt dans la rue Bonaparte.

Henry rentra d’un pas alerte à l’hôtel de Mayonne. En cette grise et froide matinée de décembre, il lui semblait qu’une lumière chaude éclairait toutes choses, autour de lui… Précédemment, il avait décidé de ne pas se rendre à l’invitation de madame de Rambuges, avance très peu déguisée dont il ne voulait pas s’apercevoir. Mais maintenant, il changeait d’avis. Il irait chez la jeune veuve pour revoir Yolaine, pour essayer de la mieux connaître. Les maléfices de la chatte blanche lui importaient peu ; il se sentait fort de toute sa dédaigneuse antipathie pour elle, et de tout son amour naissant pour la jeune fille aux yeux purs qui venait de l’émouvoir à nouveau si profondément.



À suivre...

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